Tête princière
Rayy (Iran), vers 1200
Stuc sculpté et peint
Département des Arts de l'Islam, MAO 1237
« Je préfère vous le dire tout de suite, je suis un homme.
Ne vous laissez pas abuser par l’arrondi de mon visage orné de boucles d’oreilles et encadré par quelques mèches de longs cheveux couleur de jais, échappées de mon turban bordé de fourrure. Je suis un prince-guerrier issu d’une puissante caste militaire d’origine turque, les Seljoukides. Elle fut chargée de la garde rapprochée du souverain iranien depuis le 9e siècle et jusqu’aux invasions mongoles en 1220.
Mon visage si particulier, dit « de lune », mes sourcils fins et arqués, mes yeux en forme d’amande soulignés de fard noir, mon nez discret, ma bouche qui esquisse une douce moue… tout en moi évoque les images du bouddha.
J’incarne une beauté venue de loin et qui s’est imposée dans un monde iranien alors familier des cultures bouddhistes. Ce monde était à l’époque si sensible à leurs types de beautés que la poésie persane les comparait à des pierres précieuses, à des fleurs et à l’astre lunaire.
Vous ne le voyez pas, mais je dois vous dire que j’ai pris l’habitude d’emplir de parfum un tout petit flacon plat en verre que je glisse discrètement dans les plis de mon turban pour embaumer mon sillage. Je dois ce geste à ce monde islamique dans lequel je séjourne depuis si longtemps et qui m’en a donné le goût. La beauté n’est-elle pas un domaine dans lequel les emprunts et les échanges sont toujours les bienvenus ? »